Conseil écriture : ne dis pas que ton personnage a peur... Fais-le trembler !
- manthonysitruk
- 7 mai
- 2 min de lecture
𝑄𝑢𝑖 𝑠𝑢𝑖𝑠-𝑗𝑒 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑡𝑒 𝑑𝑜𝑛𝑛𝑒𝑟 𝑑𝑒𝑠 𝑐𝑜𝑛𝑠𝑒𝑖𝑙𝑠 𝑑’𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒 ? 𝑃𝑒𝑟𝑠𝑜𝑛𝑛𝑒. 𝐽𝑢𝑠𝑡𝑒 𝑢𝑛 𝑎𝑢𝑡𝑒𝑢𝑟 𝑖𝑛𝑐𝑜𝑛𝑛𝑢 𝑞𝑢𝑖 𝑎𝑙𝑖𝑔𝑛𝑒 𝑙𝑒𝑠 𝑚𝑜𝑡𝑠 𝑒𝑛 𝑒𝑠𝑝𝑒́𝑟𝑎𝑛𝑡 𝑡𝑜𝑢𝑐ℎ𝑒𝑟 𝑗𝑢𝑠𝑡𝑒. 𝐶̧𝑎 𝑣𝑎𝑢𝑡 𝑐𝑒 𝑞𝑢𝑒 𝑐̧𝑎 𝑣𝑎𝑢𝑡… 𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑙𝑖𝑠 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑑 𝑚𝑒̂𝑚𝑒.
Parce que les émotions en carton n’intéressent personne, aujourd’hui, un principe fondamental de l’écriture : « Show, don’t tell » (Montre, ne raconte pas). Dire qu’un personnage a peur, c’est plat. Faire ressentir cette peur à travers des gestes, des sensations, des réactions physiologiques, en gros faire VIVRE l’émotion au lieu de la raconter, là c’est puissant.
« 𝐈𝐥 𝐚𝐯𝐚𝐢𝐭 𝐩𝐞𝐮𝐫. »
Sérieux ?! Peur de quoi ? Peur comment ? Peur pourquoi ?
Ton lecteur n’est pas un télépathe. Si tu lui balances un vague « Il avait peur », il ne ressentira RIEN. Du vide. Du néant. Autant ne pas écrire.
𝐑𝐞𝐠𝐚𝐫𝐝𝐞 𝐥𝐞𝐬 𝐠𝐫𝐚𝐧𝐝𝐬 𝐚𝐮𝐭𝐞𝐮𝐫𝐬.
Dans 𝐋’𝐄́𝐭𝐫𝐚𝐧𝐠𝐞𝐫, Camus ne nous dit pas que Meursault est indifférent. Il nous le fait ressentir : le soleil l’écrase, la lumière l’aveugle, son corps est une machine qui fume et boit sans conviction. Son absence d’émotion est une chape de plomb qui pèse sur le lecteur.
Dans 𝟏𝟗𝟖𝟒, Orwell ne nous dit pas que Winston est terrorisé. Il écrit : « 𝐼𝑙 𝑒𝑢𝑡 𝑙'𝑖𝑚𝑝𝑟𝑒𝑠𝑠𝑖𝑜𝑛 𝑞𝑢'𝑢𝑛 𝑚𝑎𝑟𝑡𝑒𝑎𝑢 𝑝𝑛𝑒𝑢𝑚𝑎𝑡𝑖𝑞𝑢𝑒 𝑙𝑢𝑖 𝑏𝑎𝑡𝑡𝑎𝑖𝑡 𝑙𝑒 𝑐𝑟𝑎̂𝑛𝑒. 𝑆𝑜𝑛 𝑒𝑠𝑡𝑜𝑚𝑎𝑐 𝑠𝑒 𝑙𝑖𝑞𝑢𝑒́𝑓𝑖𝑎𝑖𝑡. 𝐼𝑙 𝑛'𝑎𝑣𝑎𝑖𝑡 𝑚𝑒̂𝑚𝑒 𝑝𝑙𝑢𝑠 𝑙𝑎 𝑠𝑒𝑛𝑠𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒 𝑝𝑜𝑢𝑣𝑜𝑖𝑟 𝑐𝑜𝑛𝑡𝑟𝑜̂𝑙𝑒𝑟 𝑠𝑜𝑛 𝑣𝑖𝑠𝑎𝑔𝑒. » Voilà ce que c'est, la peur : une tempête dans le corps, une prison de chair.
Fais pareil. Ne te contente pas de poser une émotion comme une étiquette sur un bocal vide. Ouvre le bocal, fais jaillir son contenu :
❌ Il avait peur.—Pathétique.
✅ Il luttait pour avaler sa salive, une sueur glacée dégoulinait dans son dos. Son cœur cognait, trop fort, trop vite. Chaque bruit devenait une menace.—Là, on sent l’angoisse.
𝐌𝐞̂𝐦𝐞 𝐜𝐨𝐦𝐛𝐚𝐭 𝐚𝐯𝐞𝐜 𝐥𝐚 𝐭𝐫𝐢𝐬𝐭𝐞𝐬𝐬𝐞.
❌ « Elle était triste. »—Tristesse de feuille morte ou de veuve inconsolable ? On sait pas.
✅ « Ses yeux étaient secs, trop fatigués pour pleurer encore. Elle fixait le mur, le regard creux, le corps vidé d’émotion. » Là, tu ressens.
𝐌𝐨𝐫𝐚𝐥𝐢𝐭𝐞́ :
Tu veux que ton lecteur frissonne, suffoque, sente le poids d’une émotion lui tomber sur la poitrine comme un piano lâché du sixième étage ? Alors arrache ces adjectifs fades et écris avec les tripes.
Fais comme Dostoïevski, comme Zola, comme Faulkner. Mets de la chair sur tes mots. Tu veux que ton lecteur ressente quelque chose ? Alors commence par le ressentir toi-même.
[A noter que l’on peut nuancer ce point selon la narration choisie. Ecrire « j’ai peur », à la première personne, est déjà plus acceptable]
🗨️Quelle émotion trouves-tu la plus difficile à écrire ? Pourquoi ?
Et si on jouait ? Décris une émotion sans jamais la nommer, et on devine laquelle c’est ! ⬇️⬇️⬇️









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